Cryptomonnaies au Luxembourg

Analyse fiscale et juridique

Pour les investisseurs et entreprises


Par Maître Paul-Alexandre JANSSENS

AVOCAT – LAWYER – ADVOCAAT Brussels | DPO | GDPR Compliance Manager | INTERNATIONAL & EUROPEAN LAW



Le Cabinet VERSCHUEREN & Partners, fort de son expertise en droit des affaires belge, européen et international, s'engage à fournir un éclairage précis et accessible sur cette thématique complexe. Notre approche vulgarisatrice du droit et notre connaissance approfondie du cadre réglementaire luxembourgeois nous permettent d'offrir une analyse à la fois rigoureuse et compréhensible, répondant ainsi aux besoins d'information de nos clients dans ce domaine en constante évolution.

Le Grand-Duché de Luxembourg, reconnu comme un centre financier de premier plan en Europe, a su se positionner stratégiquement face à l'émergence des cryptomonnaies. Cette analyse approfondie vise à éclairer les particuliers entreprenants, les PME en croissance et les grandes entreprises multinationales sur le régime taxatoire applicable aux cryptomonnaies au Luxembourg. Dans un monde où l'innovation financière et la technologie blockchain redéfinissent les contours de l'économie mondiale, comprendre les implications fiscales et juridiques des cryptoactifs est devenu crucial pour tout acteur économique visionnaire.

I. Cadre juridique

et fiscal des cryptomonnaies au Luxembourg

Le Luxembourg, fidèle à sa réputation d'innovation financière, a adopté une approche proactive mais prudente envers les cryptomonnaies. Cette posture reflète la volonté du Grand-Duché de maintenir son attractivité pour les entreprises technologiques tout en assurant la stabilité et l'intégrité de son système financier.

  • 1. Définition et statut juridique des cryptomonnaies

    Au Luxembourg, les cryptomonnaies ne bénéficient pas du statut de monnaie légale. Elles sont considérées comme des biens meubles incorporels, une qualification qui a des implications significatives tant sur le plan juridique que fiscal [1]. Cette catégorisation place les cryptoactifs dans un cadre juridique distinct des devises traditionnelles, tout en leur reconnaissant une valeur économique tangible.


    L'Administration de l'Enregistrement, des Domaines et de la TVA (AED) luxembourgeoise a précisé que les opérations d'échange de cryptomonnaies contre des devises traditionnelles sont exemptées de TVA, alignant ainsi sa position sur la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) dans l'affaire Hedqvist [2]. Cette décision a contribué à clarifier le statut fiscal des cryptomonnaies, les rapprochant des autres instruments financiers en termes de traitement TVA.

  • 2. Cadre réglementaire pour les activités liées aux cryptomonnaies

    Le Luxembourg a mis en place un cadre réglementaire spécifique pour les activités liées aux cryptomonnaies, notamment à travers la loi du 25 mars 2020 transposant la 5ème directive anti-blanchiment de l'UE [3]. Cette législation a introduit deux nouvelles catégories d'acteurs soumis à la surveillance de la Commission de Surveillance du Secteur Financier (CSSF) :


    - Les prestataires de services d'actifs virtuels (PSAV)


    - Les prestataires de services de conservation ou d'administration d'actifs virtuels


    Ces entités doivent s'enregistrer auprès de la CSSF et se conformer aux obligations en matière de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme (LBC/FT). Cette exigence souligne l'engagement du Luxembourg à maintenir l'intégrité de son secteur financier tout en encourageant l'innovation.

II. Imposition des particuliers détenteurs de cryptomonnaies

  • 1. Taxation des plus-values

    Pour les particuliers, les plus-values réalisées lors de la cession de cryptomonnaies sont généralement considérées comme des revenus divers non imposables, à condition que ces opérations relèvent de la gestion du patrimoine privé [4]. Cependant, cette exemption est soumise à deux conditions cumulatives :

    - La durée de détention des cryptomonnaies doit être supérieure à six mois.

    - Le montant total des plus-values réalisées sur l'année ne doit pas excéder 500 euros.

    Si ces conditions ne sont pas remplies, les plus-values sont imposables au taux global d'imposition du contribuable, qui peut atteindre jusqu'à 45,78% pour la tranche de revenu la plus élevée en 2024 [5].


    L'Administration de l'Enregistrement, des Domaines et de la TVA (AED) luxembourgeoise a précisé que les opérations d'échange de cryptomonnaies contre des devises traditionnelles sont exemptées de TVA, alignant ainsi sa position sur la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) dans l'affaire Hedqvist [2]. Cette décision a contribué à clarifier le statut fiscal des cryptomonnaies, les rapprochant des autres instruments financiers en termes de traitement TVA.

  • 2. Cas des activités de trading intensif

    Lorsque les opérations sur cryptomonnaies dépassent le cadre de la simple gestion patrimoniale et s'apparentent à une activité commerciale (trading intensif), les revenus générés sont alors qualifiés de bénéfices commerciaux. Dans ce cas, ils sont soumis à l'impôt sur le revenu selon le barème progressif, ainsi qu'aux cotisations sociales.

    La qualification d'activité commerciale dépend de plusieurs critères, notamment :

    - La fréquence et le volume des transactions

    - L'utilisation de techniques ou d'outils professionnels de trading

    - Le temps consacré à cette activité

    - L'intention spéculative

    Il est important de noter que l'administration fiscale luxembourgeoise examine chaque situation au cas par cas, ce qui peut créer une certaine incertitude pour les contribuables engagés dans des activités de trading de cryptomonnaies [6].


    - Les prestataires de services d'actifs virtuels (PSAV)


    - Les prestataires de services de conservation ou d'administration d'actifs virtuels


    Ces entités doivent s'enregistrer auprès de la CSSF et se conformer aux obligations en matière de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme (LBC/FT). Cette exigence souligne l'engagement du Luxembourg à maintenir l'intégrité de son secteur financier tout en encourageant l'innovation.

  • 3. Déclaration et obligations fiscales

    Les détenteurs de cryptomonnaies au Luxembourg ont l'obligation de déclarer leurs avoirs en cryptoactifs ainsi que les revenus générés par ces derniers dans leur déclaration fiscale annuelle. Cette exigence s'applique même si les plus-values réalisées sont exonérées d'impôt.

    Pour faciliter cette déclaration, il est recommandé aux contribuables de tenir un registre détaillé de leurs transactions en cryptomonnaies, incluant :

    - Les dates d'achat et de vente

    - Les montants investis et les prix de cession

    - Les frais associés aux transactions

    Ces informations sont essentielles pour déterminer avec précision les plus-values réalisées et justifier, le cas échéant, l'application de l'exemption fiscale [7].


III. Régime fiscal des entreprises opérant dans le secteur des cryptomonnaies


Le Luxembourg, en tant que hub financier international, offre un cadre fiscal attractif pour les entreprises, y compris celles opérant dans le secteur des cryptomonnaies. Le régime fiscal applicable à ces entités vise à promouvoir l'innovation tout en assurant une contribution équitable aux finances publiques du Grand-Duché.

  • 1. Imposition des bénéfices

    Les sociétés luxembourgeoises engagées dans des activités liées aux cryptomonnaies sont soumises à l'impôt sur les sociétés (IS) au taux standard de 17% pour 2024 [8]. Ce taux s'applique aux bénéfices excédant 200 000 euros. Pour les bénéfices inférieurs à ce seuil, un taux réduit de 15% est applicable.

    En outre, les entreprises sont également assujetties à :

    - L'impôt commercial communal (ICC), dont le taux varie selon la commune d'implantation (par exemple, 6,75% pour la ville de Luxembourg)

    - La contribution au fonds pour l'emploi de 7% sur le montant de l'IS

    Ainsi, le taux d'imposition global effectif pour une entreprise basée à Luxembourg-Ville peut atteindre environ 24,94% en 2024 [9].


    L'Administration de l'Enregistrement, des Domaines et de la TVA (AED) luxembourgeoise a précisé que les opérations d'échange de cryptomonnaies contre des devises traditionnelles sont exemptées de TVA, alignant ainsi sa position sur la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) dans l'affaire Hedqvist [2]. Cette décision a contribué à clarifier le statut fiscal des cryptomonnaies, les rapprochant des autres instruments financiers en termes de traitement TVA.

  • 2. Traitement fiscal des opérations en cryptomonnaies

    Pour les entreprises, les opérations impliquant des cryptomonnaies sont généralement traitées comme des transactions en devises étrangères à des fins comptables et fiscales. Cela signifie que :

    - Les gains ou pertes résultant de la fluctuation de la valeur des cryptomonnaies détenues sont reconnus à la date de clôture de l'exercice (principe de prudence)

    - Les plus-values réalisées lors de la cession de cryptomonnaies sont incluses dans le résultat imposable de l'entreprise

    Il est important de noter que le Luxembourg applique le principe de l'accrochement du bilan fiscal au bilan commercial. Par conséquent, la valorisation des cryptoactifs dans les comptes sociaux aura un impact direct sur la base imposable de l'entreprise [10].


    - Les prestataires de services d'actifs virtuels (PSAV)


    - Les prestataires de services de conservation ou d'administration d'actifs virtuels


    Ces entités doivent s'enregistrer auprès de la CSSF et se conformer aux obligations en matière de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme (LBC/FT). Cette exigence souligne l'engagement du Luxembourg à maintenir l'intégrité de son secteur financier tout en encourageant l'innovation.

  • 3. Régime des sociétés de participation financière (SOPARFI)

    Les sociétés de participation financière (SOPARFI) luxembourgeoises peuvent présenter un intérêt particulier pour les entreprises opérant dans le secteur des cryptomonnaies, notamment pour la structuration de leurs investissements internationaux. Les SOPARFI bénéficient du régime d'exonération des participations, qui peut permettre, sous certaines conditions, d'exonérer :

    - Les dividendes reçus de filiales

    - Les plus-values réalisées sur la cession de participations

    Pour bénéficier de ce régime, la SOPARFI doit détenir une participation d'au moins 10% ou d'une valeur d'acquisition d'au moins 1,2 million d'euros, pendant une période ininterrompue d'au moins 12 mois [11].

    Ce régime peut s'avérer particulièrement attractif pour les entreprises du secteur des cryptomonnaies souhaitant structurer leurs investissements dans différentes juridictions, tout en bénéficiant de l'expertise financière et de la stabilité réglementaire du Luxembourg.


IV. Enjeux spécifiques liés à la fiscalité des cryptomonnaies


La nature unique des cryptomonnaies et leur évolution rapide soulèvent des défis particuliers en matière de fiscalité, tant pour les autorités luxembourgeoises que pour les contribuables. Ces enjeux nécessitent une approche adaptative et innovante de la part des régulateurs et des praticiens du droit fiscal.


  • 1. Valorisation et traçabilité des transactions

    L'un des principaux défis liés à la fiscalité des cryptomonnaies réside dans la détermination de leur valeur à un moment donné, étant donné la volatilité extrême de ces actifs. L'administration fiscale luxembourgeoise n'a pas encore publié de lignes directrices spécifiques sur la méthode de valorisation à utiliser. En pratique, il est généralement recommandé d'utiliser :

    - Le cours moyen de la cryptomonnaie sur une plateforme d'échange reconnue à la date de la transaction

    - Une moyenne des cours sur plusieurs plateformes majeures pour obtenir une valorisation plus robuste

    La traçabilité des transactions pose également un défi, notamment pour les cryptomonnaies offrant un haut degré d'anonymat. Les contribuables doivent être en mesure de justifier l'origine des fonds utilisés pour acquérir des cryptomonnaies, ainsi que la destination des produits de cession, afin de se conformer aux obligations fiscales et aux règles anti-blanchiment [12].


    L'Administration de l'Enregistrement, des Domaines et de la TVA (AED) luxembourgeoise a précisé que les opérations d'échange de cryptomonnaies contre des devises traditionnelles sont exemptées de TVA, alignant ainsi sa position sur la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) dans l'affaire Hedqvist [2]. Cette décision a contribué à clarifier le statut fiscal des cryptomonnaies, les rapprochant des autres instruments financiers en termes de traitement TVA.

  • 2. Qualification fiscale des nouvelles formes de revenus cryptos

    L'écosystème des cryptomonnaies génère continuellement de nouvelles formes de revenus, dont la qualification fiscale peut s'avérer complexe. Parmi ces nouveaux types de revenus, on peut citer :

    - Le staking : La participation à la validation des transactions sur certains réseaux blockchain peut générer des récompenses. Au Luxembourg, ces revenus pourraient être assimilés à des revenus de capitaux mobiliers, bien que leur traitement fiscal exact reste à clarifier.

    - Le yield farming : Cette pratique consistant à prêter des cryptomonnaies pour générer des intérêts pourrait être traitée de manière similaire aux revenus d'intérêts traditionnels, mais la question de la valorisation des tokens reçus en récompense reste complexe.

    - Les airdrops : La réception gratuite de tokens pourrait être considérée comme un revenu imposable à sa valeur de marché au moment de la réception, bien que cette position ne soit pas encore formellement établie par l'administration fiscale luxembourgeoise [13].


    - Les prestataires de services d'actifs virtuels (PSAV)


    - Les prestataires de services de conservation ou d'administration d'actifs virtuels


    Ces entités doivent s'enregistrer auprès de la CSSF et se conformer aux obligations en matière de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme (LBC/FT). Cette exigence souligne l'engagement du Luxembourg à maintenir l'intégrité de son secteur financier tout en encourageant l'innovation.

  • 3. Implications fiscales des forks et des burns

    Les événements spécifiques à l'écosystème crypto, tels que les forks (scissions de blockchain) et les burns (destruction volontaire de tokens), soulèvent des questions fiscales particulières :

    - Forks : Lorsqu'un fork résulte en la création d'une nouvelle cryptomonnaie, la question se pose de savoir si cela constitue un événement imposable. En l'absence de guidance spécifique, une approche prudente consisterait à considérer que l'imposition n'intervient qu'au moment de la cession des nouveaux tokens reçus.

    - Burns : La destruction volontaire de tokens pourrait potentiellement être considérée comme une moins-value déductible, mais cette interprétation reste à confirmer par les autorités fiscales luxembourgeoises [14].


V. Perspectives d'évolution du cadre fiscal luxembourgeois


Le cadre fiscal luxembourgeois relatif aux cryptomonnaies est appelé à évoluer pour s'adapter aux innovations technologiques et aux développements réglementaires internationaux. Cette évolution vise à maintenir l'attractivité du Grand-Duché tout en assurant une régulation efficace du secteur.

  • 1. Harmonisation avec les initiatives européennes

    Le Luxembourg, en tant que membre de l'Union Européenne, devra aligner son cadre réglementaire et fiscal sur les initiatives européennes en matière de cryptoactifs. Parmi les développements majeurs à surveiller :

    - Le règlement MiCA (Markets in Crypto-Assets) : Cette réglementation, entrée en vigueur en juin 2024, établira un cadre harmonisé pour l'émission et la négociation de cryptoactifs au niveau européen. Le Luxembourg devra adapter sa législation nationale pour se conformer à ces nouvelles règles [15].

    - La directive DAC8 : Cette extension de la directive sur la coopération administrative dans le domaine fiscal vise à améliorer l'échange d'informations sur les cryptoactifs entre les administrations fiscales des États membres. Son adoption pourrait conduire à un renforcement des obligations déclaratives pour les détenteurs de cryptomonnaies au Luxembourg [16].


    L'Administration de l'Enregistrement, des Domaines et de la TVA (AED) luxembourgeoise a précisé que les opérations d'échange de cryptomonnaies contre des devises traditionnelles sont exemptées de TVA, alignant ainsi sa position sur la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) dans l'affaire Hedqvist [2]. Cette décision a contribué à clarifier le statut fiscal des cryptomonnaies, les rapprochant des autres instruments financiers en termes de traitement TVA.

  • 2. Développement d'une fiscalité adaptée aux tokenomics

    Face à la complexification croissante des modèles économiques basés sur les tokens (tokenomics), le Luxembourg pourrait être amené à développer un cadre fiscal plus spécifique. Cela pourrait inclure :

    - La création de catégories fiscales spécifiques pour les différents types de tokens (utility tokens, security tokens, etc.)

    - L'élaboration de règles de valorisation adaptées aux spécificités des cryptoactifs

    - La mise en place de mécanismes de report d'imposition pour certaines opérations d'échange entre cryptomonnaies, afin de ne pas entraver l'innovation dans le secteur


    - Les prestataires de services d'actifs virtuels (PSAV)


    - Les prestataires de services de conservation ou d'administration d'actifs virtuels


    Ces entités doivent s'enregistrer auprès de la CSSF et se conformer aux obligations en matière de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme (LBC/FT). Cette exigence souligne l'engagement du Luxembourg à maintenir l'intégrité de son secteur financier tout en encourageant l'innovation.

  • 3. Renforcement de l'attractivité pour les entreprises crypto

    Dans un contexte de concurrence internationale accrue pour attirer les entreprises innovantes, le Luxembourg pourrait envisager des mesures fiscales incitatives spécifiques au secteur des cryptomonnaies, telles que :

    - Des crédits d'impôt pour la recherche et développement dans le domaine de la blockchain

    - Un régime fiscal préférentiel pour les revenus issus de la propriété intellectuelle liée aux technologies blockchain (patent box)

    - Un régime de consolidation fiscale adapté aux groupes opérant dans le secteur des cryptomonnaies, permettant une optimisation de leur charge fiscale globale

    Ces mesures potentielles s'inscriraient dans la continuité de la stratégie luxembourgeoise visant à positionner le pays comme un hub d'innovation financière en Europe [17].

VI. Défis et opportunités pour les acteurs du marché

L'évolution rapide du secteur des cryptomonnaies et de son cadre réglementaire présente à la fois des défis et des opportunités pour les différents acteurs du marché au Luxembourg.

  • 1. Compliance et gestion des risques

    Les entreprises et les particuliers opérant dans le domaine des cryptomonnaies font face à des exigences croissantes en matière de compliance :

    - Lutte contre le blanchiment d'argent (LBC) : Les prestataires de services d'actifs virtuels doivent mettre en place des procédures robustes de KYC (Know Your Customer) et de surveillance des transactions, ce qui peut représenter un investissement significatif, en particulier pour les start-ups [18].

    - Protection des données : Le respect du RGPD dans le contexte des technologies blockchain, intrinsèquement conçues pour être immuables, pose des défis techniques et juridiques complexes.

    - Cybersécurité : La protection des actifs numériques contre les cyberattaques est cruciale, nécessitant des investissements continus en infrastructures de sécurité.

    Ces exigences, bien que contraignantes, offrent également l'opportunité aux acteurs luxembourgeois de se distinguer par leur rigueur et leur fiabilité sur la scène internationale.


    L'Administration de l'Enregistrement, des Domaines et de la TVA (AED) luxembourgeoise a précisé que les opérations d'échange de cryptomonnaies contre des devises traditionnelles sont exemptées de TVA, alignant ainsi sa position sur la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) dans l'affaire Hedqvist [2]. Cette décision a contribué à clarifier le statut fiscal des cryptomonnaies, les rapprochant des autres instruments financiers en termes de traitement TVA.

  • 2. Innovation financière et nouveaux modèles d'affaires

    Le cadre réglementaire luxembourgeois, combiné à l'expertise financière du pays, crée un terreau fertile pour l'innovation dans le secteur des cryptomonnaies :


    - Tokenisation d'actifs : Le Luxembourg pourrait devenir un centre majeur pour la tokenisation d'actifs traditionnels (immobilier, œuvres d'art, etc.), offrant de nouvelles opportunités d'investissement et de liquidité [19].


    - Finance décentralisée (DeFi) : Les protocoles DeFi pourraient trouver au Luxembourg un environnement propice à leur développement, à condition que le cadre réglementaire s'adapte à ces nouvelles formes d'intermédiation financière.


    - Stablecoins : Le pays pourrait attirer des émetteurs de stablecoins cherchant à bénéficier de la réputation de stabilité et de l'expertise réglementaire luxembourgeoise.


  • 3. Formation et développement des compétences

    L'évolution rapide du secteur des cryptomonnaies crée une forte demande en compétences spécialisées :


    - Expertise juridique et fiscale : Les cabinets d'avocats et les conseillers fiscaux luxembourgeois doivent continuellement mettre à jour leurs connaissances pour accompagner efficacement leurs clients dans ce domaine en constante évolution.


    - Compétences techniques : Le développement de l'écosystème crypto au Luxembourg nécessite des professionnels qualifiés en développement blockchain, cryptographie et sécurité informatique.


    - Éducation financière : Il existe une opportunité pour les institutions éducatives et les organismes professionnels de développer des programmes de formation spécialisés, renforçant ainsi le positionnement du Luxembourg comme centre d'expertise en finance numérique [20].


VII. Stratégies d'optimisation fiscale pour les acteurs du marché crypto


Dans le contexte fiscal luxembourgeois, les acteurs du marché des cryptomonnaies peuvent envisager diverses stratégies d'optimisation fiscale, tout en restant dans les limites de la légalité et de l'éthique professionnelle.

  • 1. Structuration juridique optimale

    Le choix de la structure juridique peut avoir un impact significatif sur la charge fiscale globale :

    - Utilisation de SOPARFI : Pour les groupes internationaux opérant dans le secteur crypto, la mise en place d'une société de participation financière (SOPARFI) au Luxembourg peut permettre de bénéficier du régime d'exonération des participations sur les dividendes et plus-values de cession [21].

    - Société en commandite spéciale (SCSp) : Cette forme juridique, fiscalement transparente, peut être attractive pour les fonds d'investissement en cryptomonnaies, offrant une flexibilité dans la structuration des investissements tout en bénéficiant de la réputation du Luxembourg en matière de gestion d'actifs [22].


  • 2. Planification fiscale internationale

    Dans un contexte d'internationalisation croissante des activités liées aux cryptomonnaies, une planification fiscale judicieuse peut permettre d'optimiser la charge fiscale globale :

    - Choix stratégique de la localisation des activités : La répartition des fonctions et des risques entre différentes juridictions peut influencer la base imposable dans chaque pays.

    - Utilisation des conventions fiscales : Le vaste réseau de conventions fiscales du Luxembourg peut être exploité pour minimiser les risques de double imposition sur les revenus générés par les activités crypto [23].


  • 3. Gestion fiscale des crypto-actifs

    Une gestion proactive des crypto-actifs peut permettre d'optimiser leur traitement fiscal:

    - Ségrégation des portefeuilles : La séparation des cryptomonnaies en fonction de leur utilisation (investissement à long terme vs trading) peut faciliter l'application du régime fiscal le plus avantageux.

    - Timing des transactions : La réalisation de plus-values peut être planifiée pour bénéficier de l'exemption fiscale sur les gains de cession à long terme (détention supérieure à 6 mois).

    - Donation de cryptomonnaies : Dans certains cas, la donation de cryptomonnaies à des organismes caritatifs peut offrir des avantages fiscaux tout en soutenant des causes philanthropiques [24].


  • 4. Utilisation des incitations fiscales

    Le Luxembourg offre diverses incitations fiscales qui peuvent être pertinentes pour les acteurs du secteur crypto :


    - Crédit d'impôt pour investissement : Les entreprises investissant dans des équipements technologiques liés aux activités crypto peuvent potentiellement bénéficier de ce crédit d'impôt [25].


    - Régime de la propriété intellectuelle : Les revenus générés par l'exploitation de brevets ou de logiciels protégés par le droit d'auteur, notamment dans le domaine de la blockchain, peuvent bénéficier d'une exonération partielle [26].



En conclusion, le régime taxatoire des cryptomonnaies au Luxembourg reflète l'approche équilibrée du pays, cherchant à encourager l'innovation tout en maintenant un cadre réglementaire robuste. La flexibilité du système fiscal luxembourgeois, combinée à l'expertise financière du pays, offre un terrain propice au développement du secteur des cryptomonnaies.


Cependant, la complexité et l'évolution rapide de ce domaine nécessitent une vigilance constante de la part des acteurs du marché. Les particuliers et les entreprises opérant dans le secteur des cryptomonnaies au Luxembourg doivent rester informés des évolutions réglementaires et fiscales, tout en adoptant une approche proactive dans la gestion de leurs obligations fiscales.


Alors que le secteur des cryptomonnaies continue de mûrir et que le cadre réglementaire évolue, le Luxembourg a l'opportunité de renforcer sa position de leader en matière d'innovation financière. En adoptant une approche équilibrée entre régulation et promotion de l'innovation, le Grand-Duché peut créer un environnement propice au développement d'un écosystème crypto dynamique et responsable, tout en préservant son intégrité financière et sa réputation internationale.



Le Cabinet VERSCHUEREN & Partners, fort de son expertise en droit des affaires international et de sa compréhension approfondie des enjeux liés aux cryptomonnaies, se positionne comme un partenaire de choix pour accompagner les acteurs du marché dans la navigation de ce paysage fiscal complexe. Notre approche personnalisée et notre engagement envers l'excellence juridique nous permettent d'offrir des solutions sur mesure, adaptées aux besoins spécifiques de chaque client, qu'il s'agisse de particuliers entreprenants, de PME en croissance ou de grandes entreprises multinationales.



Références :

[1] Circulaire du directeur des contributions L.I.R. n° 14/5 – 99/3 – 99bis/3 du 26 juillet 2018 relative au régime fiscal applicable aux opérations sur monnaies virtuelles.

[2] Arrêt de la CJUE du 22 octobre 2015, Skatteverket contre David Hedqvist, C-264/14, ECLI:EU:C:2015:718.

[3] Loi du 25 mars 2020 portant modification de la loi modifiée du 12 novembre 2004 relative à la lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme.

[4] Article 99ter de la Loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu.

[5] Barème de l'impôt sur le revenu des personnes physiques pour l'année 2024, Administration des contributions directes du Luxembourg.

[6] Avis de la Commission des normes comptables (CNC) relatif au traitement comptable des jetons virtuels, publié le 15 octobre 2019.

[7] Guide pratique de la déclaration fiscale pour les particuliers, édition 2024, Administration des contributions directes du Luxembourg.

[8] Article 174 de la Loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu.

[9] Calcul basé sur les taux d'imposition en vigueur pour l'année 2024, incluant l'IS, l'ICC pour Luxembourg-Ville, et la contribution au fonds pour l'emploi.

[10] Article 40 de la Loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu.

[11] Article 166 de la Loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu.

[12] Recommandations du Groupe d'action financière (GAFI) sur l'application des standards de lutte contre le blanchiment aux actifs virtuels, juin 2019.

[13] Rapport de l'OCDE sur la fiscalité des actifs virtuels, 2020.

[14] Étude comparative des traitements fiscaux des événements spécifiques aux cryptomonnaies dans les juridictions de l'UE, Conseil des barreaux européens (CCBE), 2023.

[15] Règlement (UE) 2023/1114 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les marchés de crypto-actifs.

[16] Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 2011/16/UE en ce qui concerne l'échange automatique et obligatoire d'informations dans le domaine fiscal en rapport avec les crypto-actifs et la monnaie électronique, COM(2022) 707 final.

[17] "Luxembourg 2025 - Une vision pour le secteur financier", Luxembourg for Finance, 2020.

[18] Lignes directrices de la CSSF relatives à l'application des obligations en matière de LBC/FT aux prestataires de services d'actifs virtuels, 2022.

[19] "Tokenisation des actifs : opportunités et défis pour le Luxembourg", Rapport de la Luxembourg House of Financial Technology (LHoFT), 2023.

[20] "Compétences numériques pour l'économie de demain", Étude de la Chambre de Commerce du Luxembourg, 2024.

[21] "Guide pratique des SOPARFI au Luxembourg", Association des Banques et Banquiers, Luxembourg (ABBL), édition 2024.

[22] "Les sociétés en commandite spéciale (SCSp) : un véhicule d'investissement flexible pour le secteur des cryptomonnaies", Luxembourg Private Equity and Venture Capital Association (LPEA), 2023.

[23] Liste des conventions fiscales signées par le Luxembourg, mise à jour 2024, Ministère des Finances du Grand-Duché de Luxembourg.

[24] "La philanthropie à l'ère des cryptomonnaies : enjeux et perspectives pour le Luxembourg", Fondation de Luxembourg, 2023.

[25] Circulaire L.I.R. n° 152bis/3 du 21 mars 2023 relative au crédit d'impôt pour investissement.

[26] Circulaire du directeur des contributions L.I.R. n° 50ter/1 du 5 mars 2019 relative au régime fiscal de la propriété intellectuelle.